Le 4 juillet 2019, les forces britanniques arrêtaient un pétrolier iranien à Gibraltar. Le 19 juillet, des forces de commandos du Corps des gardiens de la Révolution islamique (CGRI) arraisonnaient un pétrolier vide sous pavillon britannique, le Stena Impero, en chemin du port émirati de Fujairah vers l’Arabie saoudite. Des porte-parole iraniens représentant tout l’éventail politique ont exprimé leur fierté pour l’arraisonnement du navire et fait l’éloge du CGRI pour son opération anti-britannique.

Suite à ces incidents, des porte-parole iraniens ont réitéré la position que le régime maintient depuis des années : le golfe Persique est un territoire souverain iranien ; l’Iran est responsable du détroit d’Ormuz ; les forces du CGRI y mènent des activités policières légitimes et légales, afin d’assurer la sécurité maritime et de protéger les frontières iraniennes. Le quotidien Ebtekar, proche du camp pragmatique, qui soutient le gouvernement du président iranien Hassan Rohani, a encore souligné que le détroit d’Ormuz était un territoire souverain iranien.

Des officiels du régime iranien ont avancé plusieurs raisons à la saisie du pétrolier britannique : la violation des réglementations maritimes dans le golfe Persique en entrant par la voie de sortie, la collision avec un bateau de pêche et l’extinction de ses systèmes de navigation. Tous ces arguments découlent de la position du régime selon laquelle les forces du CGRI surveillent de manière légitime et légale un territoire souverain iranien et/ou sous responsabilité iranienne.

Cette position iranienne a été explicitement réitérée dès février 2019, par le gén. Alireza Tangsiri (voir Annexe), commandant de la marine du CGRI, et de nouveau soulignée par le président Rohani lors d’une conversation avec le ministre omanais des Affaires étrangères, Youssouf Bin Alawi, Oman étant un allié local de l’Iran. Il l’a encore redit au président français Emmanuel Macron, dans une tentative d’empêcher la création d’une force de police navale européenne.

Le président Rohani a déclaré, lors de sa rencontre à Téhéran le 28 juillet avec le ministre Bin Alawi : « L’Iran et Oman portent sur leurs épaules l’essentiel de la responsabilité d’assurer la sécurité du détroit d’Ormuz. Non seulement la présence de forces étrangères n’aide pas à la sécurité dans la région, mais elle est en fait la principale cause de tensions dans la région. » [1] Le 30 juillet, Rohani a déclaré lors d’un entretien téléphonique avec le président Macron : « L’Iran a toujours été et restera toujours le principal responsable de la sécurité et de la liberté maritime dans le golfe Persique, le détroit d’Ormuz et le golfe d’Oman. » [2]

Il convient d’observer que, tout en rappelant cette position de principe, des porte-parole du régime ont aussi souligné leur droit de mener des opérations de représailles et de vengeance afin de dissuader l’Occident de tout acte de « piraterie » contre l’Iran. Pour plus d’informations sur ces menaces d’actions contre la Grande-Bretagne, voir MEMRI en français, Iran : la Grande-Bretagne menacée de représailles pour l’arraisonnement du pétrolier iranien et l’Europe pour le non-respect de l’Accord sur le nucléaire, 24 juillet 2019.

Le rapport ci-dessous examine les déclarations de représentants officiels du régime iranien exprimant sa position selon laquelle il protège le golfe Persique et le détroit d’Ormuz, ainsi que leur reconnaissance du fait que l’arraisonnement du pétrolier britannique était une mesure de représailles fondée sur le droit international. L’Annexe présente les déclarations faites en février 2019 par le commandant de la marine du CGRI, le général Tangsiri, déjà traduites et publiées par MEMRI.

La position iranienne : Le golfe Persique est un territoire iranien et le CGRI mène une politique légale

L’amiral Khanzadi, commandant de la marine militaire iranienne : « La première loi qui s’applique dans cette région [du golfe Persique] est le droit maritime iranien, et seulement ensuite le droit international »

La position selon laquelle le golfe Persique est un territoire iranien a été clairement exprimée par le commandant de la marine militaire iranienne, l’amiral Ali Khanzadi, dans une longue interview accordée le 19 juillet 2019 à YJC, publication du CGRI, parue deux jours plus tard. Il y affirmait :

Notre régime est un régime uniforme et dynamique. Et [le Guide suprême iranien Ali] Khamenei a le dernier mot dans toutes les opérations du régime. Même les forces armées unifiées, grâce à leurs relations avec Khamenei, en tant que commandant en chef des forces armées. Khamenei a annoncé clairement, conformément à ses sages plans, que les jeunes révolutionnaires répondraient dans l’espace maritime à l’opération arrogante de l’Angleterre, et nous avons témoigné de l’exécution de cet ordre. Chacun sait déjà qu’aujourd’hui, l’ère de l’intimidation et du vagabondage en mer est révolue, et que les intérêts et la souveraineté des nations doivent être respectés. Lorsque nous parlons de tout navire, c’est comme si c’était un morceau de territoire d’un pays… Les Iraniens ont un joli dicton : « Les gens qui vivent dans des maisons de verre ne doivent pas jeter de pierres sur les autres. » Aussi, les Anglais vivent dans une maison de verre [et je suggère] qu’ils imaginent ce qui se passerait si une pierre était lancée sur cette maison de verre. […]

Les forces armées iraniennes, et toutes les forces navales du pays, sont présentes sur les eaux comme un corps uniforme, apportent une parfaite sécurité aux zones maritimes sous contrôle iranien ainsi qu’aux mers entourant ces zones, et opèrent dans le cadre légal maritime iranien et international. Le droit maritime international comporte un article stipulant que les lois maritimes internationales ne prévalent pas sur les lois des pays riverains. Par conséquent, le premier droit qui s’applique dans cette région du [golfe Persique] est le droit maritime iranien, et seulement ensuite, le droit international

Khanzadi : « Les forces armées iraniennes sont responsables d’assurer la sécurité du golfe Persique et du golfe d’Oman »

Ce pétrolier [britannique] a violé tant le droit maritime iranien que le droit maritime international. Il est entré dans le détroit d’Ormuz par la mauvaise voie, et a éteint son système de navigation. Il pouvait aussi y avoir des forces armées britannique sur le pont, ce qui est interdit pour les navires de commerce, et nous le vérifions. La marine du CGRI a opéré de manière très professionnelle et exceptionnelle… Ceux qui sont obligés de respecter le droit international et les régimes maritimes [l’Occident] doivent être tenus par ces lois pour que les autres les respectent. Si ces lois ne sont pas respectées dans l’arène internationale, cela finira par causer un désordre qui menacera les intérêts de tous les pays.

Les forces armées iraniennes sont responsables d’apporter la sécurité dans le golfe Persique et dans le golfe d’Oman, et jusqu’à présent, elles ont rempli ce rôle d’une manière exceptionnelle au nord de ces régions. Ce qui cause l’insécurité maritime [dans le golfe Persique et dans le Golfe d’Oman] est la présence hypocrite des forces de l’arrogance – l’Amérique et l’Angleterre – et celles [à savoir les pays qui collaborent avec les Etats-Unis et l’Angleterre] au sein de la coalition. Ils pensent plus à leurs profits et à dérober les ressources des pays de la région qu’à répondre aux intérêts des pays de la région, et ils veulent accroître leur puissance arrogante dans le monde.

Le commandant des forces navales iraniennes Hossein Khanzadi (Source : YJC, Iran, 19 juillet 2019)
Le commandant des forces navales iraniennes Hossein Khanzadi (Source : YJC, Iran, 19 juillet 2019)

Khanzadi : « Le golfe Persique… est considéré comme notre arrière-cour » – Nous surveillons « la marine de l’ennemi, en particulier la marine américaine, depuis son point de départ et jusqu’au moment de son entrée dans la région »

Le contrôle du renseignement iranien, en particulier concernant l’arrogance mondiale [les Etats-Unis] et les forces de la coalition, dirigées par l’Amérique, est assuré par un système uniforme dirigé par les marines [de l’Iran et du CGRI]. A ce jour, nous pouvons dire que nous surveillons, étape après étape, la marine de l’ennemi, en particulier la marine américaine, depuis son point de départ et jusqu’au moment où elle entre dans la région. La connaissance que nous avons concernant la marine et son itinéraire et le moment où elle entre dans [la région] inclut le type de mission [qu’elle mène], la qualité de sa présence et ses opérations navales…

L’un des moyens à ce niveau, doté d’un bon potentiel, ce sont les drones. La capacité des drones dont nous disposons aujourd’hui à maintenir le contact avec nous est illimitée, en dépit de leur portée significative. Nous avons des archives complètes d’images à longue distance d’approches de navires américains. Nous avons aussi des images exhaustives et une grande archive de chaque instant des mouvements quotidiens des forces américaines et de la coalition. Nos drones surveillent leurs navires [commerciaux] et leurs navires de guerre, depuis le moment où ils entrent dans le golfe d’Oman et dans le golfe Persique, et cette surveillance se poursuit tout au long de leur navigation dans le golfe d’Oman et le golfe Persique. Leur comportement dans le golfe Persique, qui est considéré comme notre arrière-cour, se déroule entièrement nous notre surveillance, menée dans le respect des principes professionnels, du droit international et du droit aérien…

Des nouveaux drones s’ajoutent constamment à la marine. Les drones à longue portée sont un nouveau type de drones… Aujourd’hui, l’importance des drones a fait d’eux un moyen stratégique pour nous qui nous donne la suprématie, une vision plus large et un contrôle plus exhaustif du renseignement. Le système de drones de la marine iranienne et du CGRI contrôle totalement la région du golfe Persique et du golfe d’Oman. Nous avons également un type de drone intercontinental, et si nécessaire, nous l’utiliserons certainement. Les drones intercontinentaux peuvent être également utilisés dans la région de l’océan Indien…

La bonne nouvelle est que la mer est en sécurité, et que nous y sommes forts. L’ennemi nous surveille dans certains endroits [en mer] mais dans d’autres, l’ennemi ne peut nous surveiller. L’ennemi sera surpris dans cet endroit où il ne peut nous surveiller…

Nous devons mener nos premières manœuvres navales conjointes. Ces manœuvres amorcent le début d’une coalition navale dans la région de [l’océan Indien] qui garantit la sécurité dans la région. Par conséquent, depuis le début de l’année, nous avons tenu des réunions avec des pays amis [de l’Iran] à Bandar Abbas [en Iran], et nous avons eu des discussions sur cette question… Notre marine fait partie des forces navales les plus actives dans la région de l’océan Indien… Une coalition navale avec les pays de la région sera établie. Ce dont cette région a besoin est de coopération afin de parvenir à la sécurité pour tous. Seul l’Iran fournit la sécurité des voies maritimes dans les régions sous son contrôle. [3]

Lire la suite du rapport en anglais

Notes :

[1] President.ir/fa/110569, 19 juillet 2019.

[2] President.ir/fa/110591, 30 juillet 2019.

[3] YJC (Iran), 23 juillet 2019.

 

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