Dans un article paru le 6 décembre 2018 dans le quotidien basé à Londres Al-Sharq Al-Awsat, Saleh Al-Qallab, ancien ministre jordanien et actuellement éditorialiste du quotidien gouvernemental Al-Rai, a contesté l’affirmation selon laquelle le Hamas serait un mouvement de libération nationale palestinien.[1] Qallab écrit que le Hamas est la branche palestinienne du mouvement international des Frères musulmans (FM), et qu’il agit sur les ordres de cette organisation, du Qatar et de l’idéologue des FM, cheikh Yousuf Al-Qaradawi.

Il a ajouté que le Hamas faisait partie d’un axe régional incluant l’Iran, la Turquie, le Qatar, le régime d’Assad, le Hezbollah, les Unités de mobilisation populaire irakiennes (UMP) et les houthistes au Yémen. Si le Hamas était véritablement un mouvement de libération palestinien, il n’aurait selon lui pas torpillé les efforts de réconciliation avec le Fatah et combattu pour maintenir son pouvoir séparé à Gaza, et n’aurait pas pris systématiquement le parti du Qatar, de l’Iran et des FM, tout en tournant le dos à l’Arabie saoudite. Extraits :[2]

Il n’est en aucun cas exact ou approprié de qualifier le Hamas de mouvement de libération nationale. Si le Hamas était un mouvement de libération nationale, il serait resté neutre à l’égard des conflits dans la région. Le Hamas est une branche des Frères musulmans. C’est [un fait] connu et établi, et le Hamas l’admet. Le Hamas est lié et engagé par les ordres, directives et commandements de l’organisation internationale des Frères musulmans, au même titre que toutes les autres branches de cette organisation…

Le Fatah, le Front populaire [de Libération de la Palestine] et les autres factions ayant rejoint l’OLP peuvent être définis comme des mouvements de libération nationale, autorisés à se distancier de tous les conflits se déroulant dans la région, en particulier depuis 2011. Mais cela n’est pas le cas du Hamas, tant qu’il appartient à l’organisation internationale des FM et constitue l’une de ses branches, car le Hamas est connu pour son implication dans tous ces conflits et n’a jamais été neutre [à leur égard]…

Si ses affirmations étaient vraies, le Hamas n’aurait pas choisi le camp d’un axe ou d’un bloc dans la région, et n’aurait pas été si strictement engagé envers chaque mouvement des FM. En outre, ses dirigeants ne vivraient pas au Qatar, aux côtés de [l’idéologue des FM] Yousuf Al-Qaradawi, et n’y auraient pas été accueillis. Le Hamas n’aurait pas mené toutes les guerres de [son] pays frère, le Qatar, n’aurait pas rejoint toutes ses alliances, et n’aurait pas tourné le dos à l’Arabie saoudite, qui a été et continue d’être le plus ferme soutien de la cause palestinienne, financièrement, politiquement et à tous les autres niveaux.

Peut-on croire l’affirmation selon laquelle le Hamas est un mouvement de libération nationale et n’est affilié à aucun des axes ou blocs de la région, lorsqu’il montre un tel dévouement envers l’Iran, qui n’a d’égal que celui du Hezbollah et des UMP irakiennes ? Lorsqu’il est revenu, humilié, en Syrie sur ordre du Qatar et de l’Iran, après s’être démarqué de [la Syrie] pendant quatre ans ? Et tout cela, en dépit du fait que le camp [de réfugiés] d’Al-Yarmouk, [au sud-ouest de la Syrie] a été réduit en ruines [par le régime syrien], et alors que ce même régime syrien est incapable d’exprimer ses opinions ou de prendre des décisions en Syrie, [du fait que la compétence pour prendre] des décisions est aux mains du commandant de [la Force Qods iranienne] Qassem Soleimani et du commandant du Corps des gardiens de la Révolution islamique [iranien], Mohammad Ali Jafari.

Si le Hamas était vraiment un mouvement de libération nationale, pourquoi a-t-il suivi les directives, ou même les ordres du Qatar, du cheikh Yousuf Al-Qaradawi et des [dirigeants] des FM en Turquie ? Pourquoi a-t-il renié, en l’espace de moins de 24 heures, l’accord de La Mecque, signé en 2007 par le président [palestinien] Mahmoud Abbas et par [les dirigeants du Hamas] Khaled Mashaal et Ismaïl Haniya, sous l’égide de feu le roi saoudien Abdallah bin Abd Al-Aziz ?

Pourquoi le Hamas a-t-il reçu l’ancien émir du Qatar, Hamad bin Khalifa Aal Thani, comme un prince ou un empereur à Gaza, alors qu’il le savait impliqué dans un complot ourdi au grand jour pour éliminer l’Autorité nationale palestinienne et assassiner politiquement le président Abbas ? Pourquoi le [Hamas] refuse-t-il toujours de devenir membre de l’OLP, reconnue par les Arabes et par le monde entier comme unique représentante légitime du peuple palestinien ? Pourquoi continue-t-il d’entraver la série de contacts avec le Fatah se déroulant au Caire et ailleurs [afin d’affecter toute réconciliation intra-palestinienne] ?…

Pourquoi le pays-frère, le Qatar, a-t-il donné des millions de dollars au seul Hamas, par le biais de canaux israéliens, alors que cette aide qatarie aurait dû être apportée à l’AP et à l’ensemble du peuple palestinien ? Cela ne signifie-t-il pas qu’il existe un axe [politique] dirigé par le Qatar, et que le Hamas, en tant que branche des FM, est un membre dominant de celui-ci, aux côtés de l’Iran, de la Turquie, du régime de Bachar Al-Assad et bien entendu des houthistes au Yémen ?

Si le Hamas était un mouvement de libération nationale… pourquoi perpétue-t-il la réalité [créée par] son coup d’Etat sanglant contre l’AP en 2007 ? Pourquoi a-t-il rejoint seul toutes les négociations secrètes avec les Israéliens et les Américains sur l’Accord du siècle ?…

Après l’échec des récents pourparlers de réconciliation [entre le Fatah et le Hamas] au Caire, il a été clairement démontré que ce mouvement faisait partie d’un complot soutenu par les FM en général, le Qatar et peut-être aussi la Turquie, [complot visant à créer] l’Etat palestinien escompté dans la seule bande de Gaza, sur le fondement de l’Accord du siècle, en laissant [la décision] sur le statut de la Cisjordanie pour un lointain avenir… [3]

Lien vers le rapport en anglais

Notes :

[1] Cette affirmation a récemment été soulignée tant par le Hamas lui-même et par le Fatah, dans le cadre de la campagne visant à contrecarrer le projet de résolution initié par les Etats-Unis, condamnant le Hamas. Voir MEMRI Special Dispatch No. 7792, Palestinian Authority, Fatah Act To Thwart UN Resolution Condemning Hamas Rocket Attacks On Israel: ‘We Will Not Allow Hamas To Be Labeled A Terror Organization’; ‘We Will Serve As Its Body Armor’, 5 décembre 2018.

[2] Al-Sharq Al-Awsat (Londres), 6 décembre 2018.

[3] Special Dispatch No. 7889

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