Le diplomate algérien Lakhdar Brahimi a déclaré, lors d’une interview accordée le 13 mars 2019 à la chaîne 3 (Algérie), que l’Algérie devrait lutter énergiquement contre la corruption et rectifier les carences de son État, mais sans le démanteler, pour éviter de se retrouver dans la situation de l’Irak ou de la Libye. Il a déclaré qu’il fallait mettre un terme aux hostilités et que les élections devraient avoir lieu au moment voulu.
Il a expliqué que la précipitation vers des élections causait plus de problèmes qu’elle n’en résolvait, car dans un pays qui sort d’une guerre civile, le manque de confiance réciproque règne et la désunion subséquente est nuisible. Il a ajouté : « Méfiez-vous des élections pour des élections. C’est ce qui s’est passé en Irak. »
Brahimi est un ancien ministre des Affaires étrangères algérien et ancien envoyé des Nations unies et de la Ligue arabe en Syrie. Extraits :
Lakhdar Brahimi : Nous devons nous garder de démanteler notre État, comme l’Irak et la Libye ont été démantelés. Là-bas, des étrangers en furent responsables et nous ne devons pas nous infliger la même chose. Nous devrions nous engager dans le changement… Nous avons parlé de corruption. Oui, la corruption existe et il faut la combattre. Il faut la combattre plus vigoureusement que nous l’avons fait jusqu’à présent, mais dans le même temps, nous devons veiller à ne pas démanteler l’Etat. L’État a été construit avec certains aspects positifs et certaines failles. [Nous devrions] nous focaliser sur les défauts et les corriger. [Nous devrions] déterminer ce qui doit être changé et le changer radicalement, mais ne pas démanteler l’État.
Journaliste : Pensez-vous qu’il existe une volonté de démanteler l’Etat, par le biais d’une intervention étrangère…
Lakhdar Brahimi : Non. Quelqu’un a écrit : « Nous avons besoin d’un changement total maintenant et aujourd’hui ! » Qu’est-ce que cela veut dire ? Un changement total doit être effectué rapidement, mais à un rythme possible et pas aussi rapidement que possible. Je ne sais pas si nous avons le temps, mais selon un certain point de vue exprimé aux Nations unies, lorsqu’un pays sort d’une crise ou d’une guerre civile, il faut mettre fin aux combats et organiser rapidement des élections. Après quelque temps, j’ai commencé à dire que c’était faux. [Je pense] que vous devriez mettre fin à la guerre et commencer à organiser des élections qui auront lieu le moment venu. Si vous vous précipitez dans des élections plus vite que nécessaire, les élections créeront plus de problèmes qu’elles n’en résoudront. Nous parlons d’un pays qui sort d’une guerre civile – les gens manquent encore de confiance réciproque, pourtant vous organisez des élections. Les élections n’unissent pas les gens. Elles les divisent. C’est pourquoi les conditions nécessaires à la réussite des élections doivent être d’abord réunies. Mais méfiez-vous des élections pour des élections. C’est ce qui s’est passé en Irak.
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