Après les déclarations prononcées par le président français Emmanuel Macron, et apparemment d’autres personnalités européennes, concernant la nécessité de discussions avec Téhéran sur la question du programme de développement de missiles balistiques, les porte-parole du régime iranien ont répété la position de Téhéran concernant le rejet de toute ingérence étrangère dans cette question.

Ce rejet absolu a été exprimé de deux manières. Officiellement, Ali Akbar Velayati, conseiller du Guide suprême iranien Ali Khamenei, a menacé de nuire aux intérêts nationaux français, si la France continuait d’agir dans ce sens.[1] Dans le même temps,  Hashmatollah Falahat-Pishe, membre de la Commission de la sécurité nationale et des Affaires étrangères du Majlis (parlement) iranien, a rassuré les Européens et leur a proposé une incitation. Il a réitéré des déclarations antérieures du commandant du Corps des Gardiens de la Révolution islamique (CGRI), Mohammed Ali Jafari, qui avait déclaré que l’Iran avait restreint la portée de ses missiles, de sorte qu’ils ne puissent atteindre l’Europe, et que par conséquent, l’Iran n’était pas une menace pour l’Europe (voir MEMRI en français Le commandant du CGRI Jafari, dans un message visant à rassurer l’Europe : pour l’instant, nous nous contentons de missiles d’une portée de 2 000 km, 5 novembre, 2017). En outre, a-t-il déclaré, l’Europe pourrait bénéficier de la sécurité offerte par les missiles iraniens, qui “peuvent constituer une barrière contre les menaces arrivant en Europe”, mais il n’a pas donné de détails sur l’essence de telles menaces ou leur origine. Falahat-Pishe a souligné que l’Iran avait pris une décision stratégique en 2011 de ne pas menacer les ennemis situés au-delà d’une portée de 2 000 km, car, a-t-il expliqué, le président américain George W. Bush avait dépeint l’Iran comme une menace pour l’Europe. Pour cette raison, l’Iran a annoncé qu’il interrompait la production de son missile Shihab 4, d’une portée de plus de 2 000 km. Il convient d’observer que, selon une déclaration de l’ancien chef d’état-major iranien Hassan Firouzabadi, l’Iran avait accepté, lors des négociations de 2013-2015, de restreindre la portée de ses missiles à 2 000 km seulement, portée couvrant Israël – ce qui constituait selon lui une ligne rouge pour le régime iranien – et l’administration Obama l’avait accepté.[2]

Il convient d’observer que, même si Falahat-Pishe a qualifié cette portée de 2 000 km de purement défensive, elle est considérée dans la communauté professionnelle comme clairement offensive.

Le présent rapport présente les déclarations de Velayati et de Falahat-Pishe, ainsi qu’un article publié par un quotidien réformiste iranien, appelant le régime iranien à débattre de son programme de missiles avec l’Europe. Ceci dans le but de protéger les intérêts nationaux de l’Iran, afin d’obtenir la reconnaissance européenne de son besoin de missiles d’une portée de 2000 km et de préparer le terrain à son expansion dans la région, au-delà de la Syrie, de l’Afghanistan et de l’Irak.[3]

Velayati : « Il n’est pas dans l’intérêt de Macron et de la France de s’ingérer dans [la question des] les missiles et dans les affaires stratégiques iraniennes… Qui est-il pour s’ingérer ? »

Le 18 novembre 2017, Ali Akbar Velayati, conseiller du Guide suprême iranien Ali Khamenei, a affirmé : Je rejette et condamne les récentes déclarations anti-Iran du président français. Il n’est pas dans l’intérêt de Macron et de la France d’intervenir dans les [programmes] de missiles et les affaires stratégiques de l’Iran, car elles sont très sensibles pour nous. Toute ingérence de ce genre ne fera que diminuer la valeur de la France aux yeux de l’Iran.

En tant qu’Iranien connaissant bien les questions de politique étrangère et l’histoire de France, je suggère à la France de suivre la voie du général De Gaulle, lorsqu’il dirigeait la politique étrangère – à savoir, d’agir de manière semi-indépendante [c’est-à-dire ne pas suivre la politique des Etats-Unis].

Nous ne demandons pas l’autorisation d’étrangers [concernant nos décisions] portant sur les questions de défense iranienne. [Nous ne leur demandons] pas si nous aurons des missiles ou non, ou combien de kilomètres la portée de ces missiles atteindra.

En quoi cette question est-elle liée à Macron ? Qui est-il pour s’ingérer ? S’il veut que les relations Iran-France prospèrent, il ne doit pas intervenir dans ces questions. C’est contraire aux intérêts nationaux français.

Manifestement, notre réponse [à une demande de discussion sur la question des missiles] sera négative . Pourquoi soulève-t-il cette question, alors qu’une fois qu’on lui aura dit non, ils diront que Macron a échoué dans sa politique ? Il doit faire quelque chose [qui réussisse], afin qu’ils disent ensuite que sa politique a réussi.

Macron doit entendre ce que moi, citoyen iranien, j’affirme : [Il doit] accepter que s’il intervient dans cette affaire, notre réponse sera certainement négative, et qu’il n’y a aucune chance, pas même un pour cent de chance, pour que nous disions oui à une requête qui interfère dans nos affaires nationales.

Je rejette également certaines des recommandations de certaines personnes en Iran, selon lesquelles nous devrions mener des pourparlers sur les missiles en Europe. Aucun pays indépendant ne met ses intérêts nationaux en vente à des prix soldés.[4]

Lire le rapport dans son intégralité en anglais

 

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