Au cours du mois de janvier 2019, le régime syrien et les médias qui lui sont affiliés ont haussé le ton de leurs déclarations contre Israël. Ces déclarations ont été formulées en réaction aux attaques continues menées par Israël contre la présence iranienne en Syrie. Le 11 janvier, une source militaire syrienne a rapporté que des avions israéliens avaient tiré plusieurs roquettes sur la région de Damas,[1] et le 20 janvier, l’armée syrienne a fait état d’une attaque israélienne au sud du pays, qui a eu lieu de manière inhabituelle en plein jour. [2] Le régime syrien a réagi en tirant un missile sol-sol contre le Golan israélien.[3] Cela a incité Israël à lancer ce que le régime syrien a qualifié « d’attaque la plus violente et la plus vaste » en Syrie à ce jour, qui, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, a fait au moins 21 victimes, dont 12 membres du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI).[4] Dans un geste inhabituel, Israël a reconnu avoir mené cette dernière attaque, dont l’une des cibles était l’aéroport international de Damas.[5]
En sus de ses réponses habituelles aux attaques – comme l’affirmation qu’Israël n’ose attaquer la Syrie que grâce au soutien qu’il reçoit des Etats-Unis et que le Conseil de Sécurité des Nations unies (CSNU) ne fait pas assez pour y mettre un terme – le régime syrien a commencé à adopter un ton plus virulent et à menacer d’une attaque directe contre Israël. Des articles dans la presse du régime et en faveur du régime ont exprimé de telles menaces, mettant en garde Israël que la Syrie disposait de capacités de missiles dont il ignore l’existence et que sa fin est proche.
Le présent rapport examine les menaces émises par des officiels syriens et par la presse syrienne contre Israël.
Le régime syrien : Israël ne sera pas capable de résister aux missiles syriens, qui peuvent l’atteindre en tout lieu
Lors d’une session du CSNU le 22 janvier 2019 consacrée à la situation au Moyen-Orient, le représentant syrien à l’ONU, Bachar Al-Jaafari, a critiqué l’ONU qui s’abstient de condamner « l’agression israélienne quasiment quotidienne » contre la Syrie, dont le dernier exemple était selon lui le bombardement israélien contre l’aéroport international de Damas.
Adressant un message menaçant à Israël, il a demandé : « N’est-il pas temps que le CSNU prenne les mesures nécessaires pour mettre fin aux attaques israéliennes répétées sur le sol de la République arabe syrienne ? Ou la Syrie doit-elle attirer l’attention de ce conseil sur les bellicistes, en exerçant son droit légitime à l’autodéfense et en répondant à l’attaque israélienne contre l’aéroport international civil [de Damas] par une attaque similaire contre l’aéroport de Tel-Aviv ? » [6]
Le général syrien à la retraite Reza Shariqi a déclaré à l’agence de presse russe Sputnik qu’Israël ne pourrait résister à une attaque de missiles syrienne : « Au cours des dernières années, l’armée arabe syrienne a réussi à préserver ses principales capacités de dissuasion, et notamment [sa série] de missiles, qui est restée parfaitement intacte et n’a subi aucun dommage. Le nombre ou l’efficacité des missiles, notamment des missiles stratégiques, n’a pas diminué, malgré les tentatives effrénées de l’ennemi israélien – totalement infructueuses – de les découvrir ou d’utiliser ses agents pour attaquer les installations de missiles et les détruire. [L’ennemi] sait qu’aujourd’hui, la guerre est devenue une guerre de missiles et de surprises, et que ce sont des guerres de ce genre qui changeront la face de la région lorsqu’elles éclateront… Si une guerre éclate, le [système] israélien ‘Dôme de fer’ sera incapable d’arrêter le barrage de missiles syrien, missiles stratégiques qui pourront atteindre chaque cible dans les terres occupées… » [7]
L’ambassadeur syrien au Liban, Ali Abd Al-Karim Ali, a déclaré dans ce contexte : « Le système de [missiles] S-300 est opérationnel, et Israël le comprend. L’armée syrienne est capable d’affronter l’ennemi… La Syrie est aujourd’hui bien plus forte qu’au début de la crise… La Syrie et le Liban peuvent se coordonner mutuellement pour affronter l’agression, car tous deux ont été attaqués par le même ennemi. » [8]
Le quotidien libanais Al-Diyar a rapporté que 65 pilotes de combat syriens avaient envoyé une lettre au président Assad, lui demandant l’autorisation d’utiliser leurs avions pour mener des attaques-suicides contre des bases aériennes israéliennes. Selon l’article, les pilotes auraient écrit : « M. le Président, nous ne pouvons plus tolérer le fait que les avions de l’ennemi israélien bombardent la capitale Damas. Si chaque paire d’avions syriens est équipée de quatre bombes, nous pourrons et voudrons mener des opérations de martyre et détruire les 30 bases aériennes de l’armée de l’air israélienne, et paralyserons les avions israéliens, de sorte que l’ennemi connaisse le prix à payer pour avoir bombardé Damas et ses environs… » [9]
Nous frapperons les avions israéliens même en dehors de l’espace aérien syrien
Comme indiqué, plusieurs articles de la presse du régime et en faveur du régime syrien ont adopté un ton menaçant contre Israël. Turki Saqer, éditorialiste du quotidien gouvernemental Teshreen, a menacé que le régime attaquerait des avions israéliens, même en dehors de l’espace aérien syrien. Il a écrit : « Les cieux syriens ne sauraient être un espace ouvert pour les avions israéliens ; c’est pourquoi [ces avions] n’osent pas pénétrer l’espace aérien syrien. Dans le même temps, l’ennemi, Israël, ne veut pas croire que les règles ont changé et que les systèmes de défense aériens syriens sont bien plus efficaces qu’il ne l’escomptait, lorsqu’il a décidé de remplacer ses frappes aériennes par des attaques de missiles lancées de l’extérieur de la Syrie. [Lorsqu’il a fait cela], il a été surpris de découvrir que ses missiles avaient perdu leur efficacité et qu’ils traversaient le ciel syrien [pour être interceptés] comme des babioles avant d’atteindre leurs cibles. »
« Il ne fait aucun doute que les attaques répétées d’Israël en Syrie, qui se produisent juste au moment où les gangs terroristes et leurs alliés subissent des défaites croissantes face à l’armée syrienne et à ses alliés, sont pleinement coordonnées avec les Etats-Unis – [car les Etats-Unis sont] le principal protecteur du terrorisme et des terroristes, et le principal protecteur d’Israël, lui évitant toute responsabilité face au monde. Cela encourage les dirigeants de l’entité sioniste à poursuivre leurs crimes perpétuels sans crainte de punition ou de représailles. Mais au bout du compte, si les dirigeants israéliens continuent cette série de crimes, qu’ils s’attendent à une réaction plus vigoureuse. Nous n’allons pas seulement intercepter leurs missiles mais viser les avions qui les ont tirés, même lorsqu’ils sont en dehors de l’espace aérien syrien, pour que l’ennemi tyrannique comprenne que quiconque frappe [la Syrie], peu importe sa puissance, subira un contrecoup beaucoup plus puissant. » [10]
Il est temps qu’Israël disparaisse de la région
Yousuf Jadd Al-Haqq, éditorialiste du quotidien pro-gouvernemental Al-Watan, écrit que la fin d’Israël est proche : « L’émergence de la coalition de la résistance dans la région a renversé l’équilibre des forces, de sorte qu’Israël, jadis intimidant, a commencé à craindre pour son existence même. Car le jour viendra où les forces de la coalition, ensemble, seront capables de [viser] chaque pouce du territoire de la Palestine, que l’entité sioniste a envahie et occupe par la force… »
« Les Israéliens n’ont nulle part où fuir dans la région, à la différence des Palestiniens en 1948 et en 1967 et des Libanais en 2006, qui ont pu trouver un refuge, presque tous en Syrie et certains en Jordanie et en Egypte. Les Israéliens n’ont personne pour leur donner refuge dans la région, aussi ils se retrouveront à bord de navires européens ou américains, qui les attendront sur la côte de Tel-Aviv pour les sauver de l’enfer. En conséquence, ils ne peuvent s’adapter aux conséquences et aux implications de la guerre, et ils ne regretteront pas de quitter la terre qui n’a jamais été la leur en premier lieu, et avec laquelle ils n’ont aucun lien, sinon les illusions et les contes inventés par leurs dirigeants, hommes politiques et rabbins. Aussi, ils ne combattront et ne résisteront pas ? Leur seule préoccupation sera de fuir et de reprendre leur vie d’autrefois dans les pays d’où eux et leurs ancêtres sont venus […] »
« Les actes provocateurs de Netanyahou à l’égard de la Syrie et des autres pays de la coalition de la résistance auront des conséquences, qui ne leur permettront pas, à lui et à son entité, de maintenir leur attitude arrogante, prétentieuse et hautaine – [attitude] qui a été rendue possible par les nouvelles circonstances dans lesquelles certains Arabes se précipitent vers lui et dans lesquelles des gens comme Trump et son gang sont arrivés au pouvoir aux Etats-Unis. Mais le fait indéniable est que la Syrie, l’Iran et l’axe de la résistance ne resteront plus silencieux encore longtemps face aux actes de provocation et d’agression israéliens de Netanyahou, qu’ils soient la conséquence de motivations électorales, la démonstration d’un étalage de pouvoir, ou une tentative d’échapper aux conséquences du procès de Netanyahou qui approche. La présence israélienne sur notre terre touche désormais à sa fin, et qui sait ? Peut-être la présence d’un homme comme Netanyahou à la tête de cette entité étrangère est-elle une [opportunité] qui nous est offerte par le destin pour réaliser la prophétie de la disparition [ultime] de cette entité – car aujourd’hui, 70 ans après la création [d’Israël], il est grand temps que cela se produise. » [11]
La Syrie dispose de missiles dont Israël ignore jusqu’à l’existence
En réponse aux déclarations du représentant de la Syrie à l’ONU, Bachar Jaafari, concernant une éventuelle attaque syrienne contre l’aéroport israélien de Ben Gourion, Fares Aziz Dib, éditorialiste d’Al-Watan, a affirmé qu’il fallait le prendre au sérieux, d’autant plus que la Syrie possède des missiles dont Israël ignore même l’existence. Il a écrit : « Comme de coutume avec ce genre de déclarations, certaines personnes, délibérément ou non, les ont vidées de leur sens en signalant, par exemple, que de telles déclarations ont été fréquemment faites par le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah, [sans jamais être réalisées]. Ces gens ne comprennent pas qu’il n’y a aucune comparaison entre ces deux [personnalités] et ce qu’elles représentent. Avec tout le respect dû à Nasrallah, il n’est pas le représentant d’un pays. Il est le dirigeant d’un [mouvement de résistance populaire, et il représente] l’opinion de tous les hommes libres dans le monde, mais [pourtant], une déclaration officielle d’un chef d’Etat est tout autre chose, et l’ennemi comprend ses implications bien mieux que les supporters de la résistance. »
« En outre, cette déclaration ne doit pas être considérée comme un message direct adressé uniquement à l’ennemi sioniste. L’ennemi [Israël] n’a pas besoin de tels messages, car il sait parfaitement que la Syrie réagira [aux attaques contre elle], même s’il n’a jamais eu le courage d’admettre l’étendue de ses pertes… La réalité sur le terrain suggère que la déclaration [d’Al-Jaafari] est une sorte de ‘nouvelle’ pour tous ceux qui défendent toujours les [attaques] insensées d’Israël. »
« Plus important encore, l’équation ‘aéroport contre aéroport’ n’a pas été choisie au hasard. Au bout du compte, elle comporte une inconnue que les Israéliens n’ont pas été en mesure de découvrir pendant les huit années de la guerre [de Syrie] – [à savoir] si l‘arme qui peut frapper l’aéroport de Tel-Aviv est une arme inconnue d’Israël, [une arme] au sujet de laquelle il envoie encore ses agents pour collecter des informations. Dans le passé, [les Israéliens] ont tenté d’utiliser le mensonge de la ‘destruction de la défense aérienne syrienne’, aux moyens de leurs agents au sein des organisations terroristes, pour découvrir que ce qui avait été détruit était inopérant dès le début. Mais que dire des [armes] qui n’ont pas encore été découvertes ? » [12] [13]
Lien vers le rapport en anglais
Notes :
[1] Sana.sy, 11 janvier 2019.
[2] Sana.sy, 20 janvier 2019.
[3] Al-Akhbar (Liban), 22 janvier 2019.
[4] Syrianhr.com, 22 janvier 2019.
[5] Bbc.com, 21 janvier 2019.
[6] Sana.sy, 22 janvier 2019.
[7] Arabic.sputniknews.com, 25 janvier 2019.
[8] Elnashra.com, 25 janvier 2019.
[9] Addiyarcomcarloscharlesnet.com, 22 janvier 2019. Il convient d’observer qu’Al-Diyar n’a pas publié de copie de cette lettre.
[10] Teshreen (Syrie), 14 janvier 2019.
[11] Al-Watan (Syrie), 24 janvier 2019.
[12] Al-Watan (Syrie), 27 janvier 2019.
[13] Special Dispatch No. 7874