Par A. Savyon*
Le 8 avril 2019, le président Trump a annoncé la désignation du Corps des Gardiens de la Révolution islamique d’Iran (CGRI) comme une organisation terroriste étrangère (Foreign Terrorist Organization, FTO), y compris sa Force Qods (voir Annexe).[1]
Le présent rapport traite de l’impact de cette désignation, sur les plans économique et militaire et aux niveaux local, régional et international.
Le CGRI comme organisation économique
Le CGRI, qui fait partie de l’armée iranienne, est une immense entité économique. Ses branches économiques font partie intégrante de l’infrastructure stratégique de l’Iran, dans les domaines de la construction, de l’énergie, des communications, et de l’agriculture. Désigner le CGRI comme une FTO portera un coup considérable à sa puissance économique à l’intérieur de l’Iran et à sa capacité d’opérer en dehors.
L’aspect économique de la désignation du CGRI comme FTO
Ainsi, désigner le CGRI comme une FTO est la continuation de la politique de l’administration Trump, qui se focalise sur les sanctions économiques contre l’Iran. Si les sanctions américaines à ce jour ont principalement concerné le secteur pétrolier – principal secteur de l’économie iranienne – et la banque, les sanctions porteront à présent atteinte à l’entité économique la plus vitale du régime iranien.
Cette initiative semble viser à contrecarrer le consentement partiel de l’Iran aux directives du Groupe d’action financière (GAFI)[2] visant à combattre le blanchiment d’argent et le terrorisme – directives jusqu’ici rejetées par l’Iran, de crainte qu’en les acceptant, il expose le CGRI et ses organisations à un préjudice direct. Sous la pression européenne, l’Iran a obtenu à ce jour une série de prorogations pour l’imposition de directives du GAFI à son égard, et l’on craint à présent que l’Iran obtienne un statut spécial, dans le cadre duquel il sera tenu de respecter seulement certaines des lois et réglementations du GAFI. La décision de l’administration Trump, à l’heure actuelle, de désigner le CGRI comme une FTO paraît éviter que l’Iran accepte un tel arrangement spécial, ce qui permettrait au CGRI de poursuivre son activité dans le pays et dans la région.
L’aspect régional de la désignation du CGRI comme FTO
Un autre aspect de la désignation par l’administration Trump du CGRI comme FTO est que cela bloquera l’activité de l’Iran en Irak et en Syrie, qui est menée par le CGRI. L’Iran s’emploie à exploiter l’infrastructure bancaire, les projets de construction, le commerce bilatéral et l’énergie de l’Irak, principalement dans le secteur pétrolier, comme une plateforme importante pour contourner les sanctions américaines contre l’Iran ; voir à ce sujet les rapports suivants de MEMRI :
● L’Iran prend le contrôle du système bancaire irakien avec l’accord du Premier ministre irakien, 12 mars 2019.
● L’importance de l’Irak pour la survie du régime iranien et son économie suite aux sanctions américaines, 3 février 2019
Désigner le CGRI comme organisation terroriste permet à l’administration Trump d’imposer des sanctions à l’Irak, pour violations des sanctions américaines contre l’Iran.
L’aspect international de la désignation du CGRI comme FTO
Avec cette désignation, les Etats-Unis s’alignent de nouveau sur leurs alliés traditionnels – le monde arabe sunnite modéré et Israël – contre l’Iran, sa Révolution islamique et l’axe de la résistance qu’il a établi à travers le Moyen-Orient.
L’aspect militaire de la désignation du CGRI comme une FTO
L’Iran pourrait choisir d’opérer des milices chiites – peut-être en Irak – contre les intérêts américains dans le pays. Comme le commandant du CGRI, Mohammed Ali Jafari, a averti le 7 avril 2019, désigner le CGRI « portera atteinte à la sécurité nationale de l’Iran » et créera dans son sillage « une inquiétude trouble pour les forces américaines dans la région ». [1] Voir les articles suivants de MEMRI :
- Iran-Backed Shi’ite Militias In Iraq: We Will Drive Out The Americans By Force, 8 janvier 2019
- Legislative Efforts To Expel U.S. Troops From Iraq, Alongside Shi’ite Militias’ Threats To Force Them Out, 6 mars 2019.
Annexe : Déclaration du président américain sur la désignation du CGRI comme organisation terroriste étrangère – 8 avril 2019
Aujourd’hui, j’annonce officiellement le projet de mon administration de désigner le Corps des gardiens de la Révolution islamique d’Iran (CGRI), y compris sa Force Qods, comme une Organisation terroriste étrangère selon l’Article 219 de la loi sur l’immigration et la nationalité. Cette mesure sans précédent, prise par le Département d’Etat, reconnaît le fait que l’Iran n’est pas seulement un Etat parrain du terrorisme, mais que le CGRI participe activement, finance et encourage le terrorisme comme instrument d’Etat. Le CGRI est le principal moyen utilisé par gouvernement iranien pour diriger et appliquer sa campagne terroriste mondiale.
Cette désignation sera la première fois que les Etats-Unis désignent un élément d’un autre gouvernement comme FTO. Elle souligne le fait que les actions de l’Iran sont fondamentalement différentes de celles des autres gouvernements. Cette initiative élargira considérablement la portée et l’ampleur de notre pression maximale exercée sur le régime iranien. Les risques liés aux relations commerciales avec le CGRI ou à son soutien sont désormais clairement définis. Si vous faites affaire avec le CGRI, vous financez le terrorisme.
Cette action envoie un message clair à Téhéran, selon lequel son soutien au terrorisme a de graves conséquences. Nous continuerons d’accroître la pression financière et d’élever le prix payé par le régime iranien pour son soutien aux activités terroristes, jusqu’à ce qu’il renonce à son comportement pernicieux et illégal. [4]
*A. Savyon est la Directrice du MEMRI Iran Media Project.
Lien vers le rapport en anglais
Notes :
[1] Whitehouse.gov, 8 avril 2019
[2] Organisation intergouvernementale créée en 1989, à l’initiative du G7, pour élaborer des politiques de lutte contre le blanchiment de capitaux ; en 2001, son mandat s’est étendu pour inclure financement du terrorisme.
[3] ISNA (Iran), 7 avril 2019.
[4] Whitehouse.gov, 8 avril 2019.