Par C. Meital*
La présentation, le 21 décembre 2017, par la Chambre des Représentants des Etats-Unis, d’un projet de loi appelant le gouvernement égyptien à adopter des réformes garantissant que les chrétiens coptes du pays jouissent des « mêmes droits et opportunités que tous les autres citoyens égyptiens » et qu’il « mette un terme à la culture de l’impunité pour les attaques contre les chrétiens » [1] a provoqué de profonds désaccords entre les coptes égyptiens résidant aux Etats-Unis et l’establishment politique chrétien en Egypte. Le projet de loi H.Res.673, exprimant la préoccupation devant les attaques contre les coptes chrétiens en Egypte, est fermement soutenu par l’organisation de solidarité copte basée aux Etats-Unis.[2] Il a été déposé par le représentant James French Hill (R-AR), pour son compte et pour celui des représentants Ileana Ros-Lehtinen (R-FL), Dave Trott (R-MI), David Cicilline (D-RI), Brad Sherman (D-CA) et Carolyn B. Maloney (D-NY).
Le projet de loi H.Res.673 présente l’histoire de la minorité copte en Egypte. Il observe qu’ « environ 15 % des coptes ont émigré d’Egypte au cours des dernières décennies afin d’échapper à la discrimination », énumère les actions du président égyptien Al-Sissi au profit des coptes, mais observe que la loi sur la construction des églises en Egypte adoptée en août 2016 « n’a pas levé de fardeau important sur la capacité de construire une église »,[3] et souligne « la grave discrimination tant dans l’emploi public que privé » en Egypte et les persécutions et les violences perpétrées par les citoyens égyptiens et l’Etat islamique à l’encontre des coptes. Selon le projet de loi, les « dirigeants diplomatiques américains contribuent de manière significative et substantielle à la protection internationale des minorités religieuses, de leurs pratiques confessionnelles et de leurs lieux de culte », et « la liberté de religion et les droits de l’homme sont une pierre angulaire de la démocratie ». Reconnaissant « l’importance centrale et historique du partenariat entre les Etats-Unis et l’Egypte pour promouvoir les intérêts communs des deux pays », le projet de loi exprime son appréciation pour « le rôle régional de l’Egypte comme partenaire dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent » et « exhorte le gouvernement égyptien à adopter des réformes sérieuses et légitimes garantissant que les chrétiens coptes obtiennent les mêmes droits et opportunités que tous les autres citoyens égyptiens », reconnaisse « la nécessité pour les dirigeants égyptiens de prendre des mesures en vue d’une réforme de l’éducation qui accorde la priorité à l’enseignement impartial de toutes les religions et d’une réforme politique qui accorde la priorité aux droits de l’homme, aux libertés fondamentales et au respect de la loi », et à « prendre des mesures supplémentaires pour mettre fin à la culture de l’impunité pour les attaques contre les chrétiens et continuer de procéder à l’arrestation, à la poursuite et à la condamnation des individus qui perpètrent des attaques contre les coptes et les autres chrétiens en Egypte ».[4]
En réaction à la présentation du projet de loi, Solidarité Copte, organisation influente des coptes égyptiens aux Etats-Unis, a mis en ligne sur son site web une explication détaillée du projet de loi, ajoutant : « Solidarité Copte exhorte les membres du Congrès à co-parrainer et à adopter promptement le projet de loi H.RES 673 qui fournit un soutien moral indispensable à la population copte, de plus en plus marginalisée en Egypte, et oblige l’administration Al-Sissi à rendre des comptes pour ses mauvais traitements à l’encontre de la minorité copte. » [5]
Sur sa page Facebook, le membre et militant de Solidarité Copte Madgi Khalil a expliqué l’essence du projet de loi, écrivant : « Aujourd’hui, vendredi 22 décembre 2017, alors que la populace a attaqué l’église copte de Giza, aux environs du Caire,[6] le Congrès a débattu d’un nouveau projet de loi soutenant les coptes en Egypte. Depuis des années, Solidarité Copte coopère avec les législateurs américains pour mettre en lumière la souffrance des coptes et appeler à les soutenir. Au cours de l’année passée, l’organisation est parvenue à déposer [sic] une série de projets de lois devant le Congrès, pour la première fois dans l’histoire de la question copte, parmi lesquels figure celui [déposé] aujourd’hui… Ce projet de loi [expose] les massacres des coptes en Egypte et définit leur statut de citoyens de seconde zone. Le projet de loi appelle le gouvernement égyptien à établir l’égalité entre les musulmans et les coptes en Egypte, dans tous les aspects [de la vie] et met également en lumière le projet avorté de la Loi sur la construction d’églises en Egypte qui a encore aggravé la situation. » [7]
Le projet de loi H.Res.673 a été vivement critiqué en Egypte, par les coptes – y compris les institutions de l’église orthodoxe, des militants et des citoyens ordinaires – et par les législateurs et médias du pays, tant coptes que musulmans, qui ont affirmé que le fait que le Congrès des Etats-Unis traite de cette question constitue une grossière ingérence dans les affaires intérieures de l’Egypte, et que le problème des coptes devait être résolu par l’Egypte seule.
Des auteurs égyptiens, coptes et musulmans, ont également exprimé leur ressentiment contre la “trahison de la patrie” par les coptes aux Etats-Unis en encourageant le Congrès à se mêler d’affaires qui ne le concernent pas. Ils ont fait l’éloge de l’opposition de l’église au projet de loi, tout en critiquant le ministère des Affaires étrangères égyptien qui s’est abstenu de s’opposer au projet de loi. Un autre argument largement entendu est que le projet de loi était une réponse aux mesures prises par l’Egypte contre les Etats-Unis à l’ONU, après la reconnaissance par le président Trump de Jérusalem comme capitale d’Israël. [8]
*C. Meital est chargée de recherche à MEMRI
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