Hasan Öztürk, éditorialiste du média de l’AKP Yeni Safak, signe un article intitulé “Nous ne sommes ni pro-Russie, ni pro-OTAN ; nous sommes Turcs, grâce à Dieu”, dans lequel il aborde les relations avec l’Occident et la Russie.
L’éditorialiste turc est d’avis que le principal objectif de l’attaque conjointe USA-Royaume-Unis-France en Syrie n’était pas de punir Assad, mais plutôt de semer la zizanie entre la Turquie et la Russie. Il convient d’observer que, le 14 avril, le ministère turc des Affaires étrangères a fait savoir que l’opération menée par Washington, Londres et Paris était une “réaction adéquate à l’attaque chimique qui a causé la mort de nombreux civils à Douma le 7 avril. » Le ministère a précisé : “Nous sommes satisfaits de cette opération qui a apaisé la conscience de l’humanité, face à l’attaque de Douma, dont on estime qu’elle a très probablement été menée par le régime”.[1]
La déclaration d’Ankara a suscité la déception à Moscou. Toutefois, le jour même, le président russe Vladimir Poutine et le président turc Recep Tayyip Erdogan s’entretenaient au téléphone. Le président russe a souligné que le bombardement représentait une grave violation de la Charte de l’ONU et des normes et principes fondamentaux du droit international. Le Kremlin a également indiqué que la Russie et la Turquie devaient intensifier leur coopération bilatérale pour promouvoir une solution politique en Syrie.[2]
Cependant, le 14 avril également, Erdogan recevait un appel téléphonique du président français Emmanuel Macron. Au cours de leur conversation, le président turc a réitéré la condamnation par la Turquie de l’usage d’armes chimiques et ajouté que les massacres perpétrés par le régime d’Assad au moyen d’armes chimiques et conventionnelles devaient être empêchés.[3]
Le 16 avril, Macron aurait déclaré que par leurs frappes en Syrie, Washington, Londres et Paris avaient séparé la Turquie de la Russie. Une réaction du ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Çavuşoğlu s’en est suivie immédiatement.[4]
Lors d’une conférence de presse conjointe avec le Secrétaire-général de l’OTAN Jens Stoltenberg à Ankara, Çavuşoğlu a affirmé que les relations d’Ankara avec Moscou n’étaient pas une alternative à ses liens avec l’Occident, précisant que les liens entre la Turquie et la Russie n’étaient pas fragiles au point que le président français puisse les rompre.[5]
Le porte-parole du Kremlin Dmitry Peskov a également commenté la déclaration de Macron en ces termes : “Non, ces frappes ne nous ont pas divisés. Ce n’est pas un secret que les positions de Moscou et d’Ankara diffèrent sur plusieurs points. Dans le même temps, cela ne nous empêche pas de continuer à échanger des opinions et à discuter cette divergence de positions”.[6]
Öztürk a souligné que les alliances de la Turquie avec l’OTAN et la Russie étaient dans les deux cas simplement tactiques, et reposaient uniquement sur la realpolitik. Il a souligné : “Nous ne sommes ni du côté de la Russie, ni de celui des Etats-Unis. Nous sommes aux côtés de la nation, des intérêts de la Turquie et de la pérrenité de la Turquie”.
Extraits :[7]
L’objectif présumé des frappes USA-RU-France en Syrie : « pourrir les relations »entre la Turquie et la Russie
« Le président français Emmanuel Macron a vendu la mèche. ‘En frappant le régime de Damas, nous avons séparé la Russie de la Turquie. La Turquie a jugé que les attaques de missiles étaient positives’, a-t-il dit.
Oui, la Turquie a jugé que l’intervention des missiles des USA, du Royaume Unis et de la France contre les attaques chimiques de Bachar Assad fut une chose positive.
Mais il y a un contexte à cette déclaration. Par exemple, il a été dit : ‘le sang coule en Syrie depuis sept ans ; où aviez-vous l’esprit pendant ces sept ans où Assad massacrait son peuple ?’ Il a aussi été dit : ‘vous intervenez lorsqu’il tue avec des armes chimiques, mais vous n’intervenez pas lorsqu’il tue avec des armes conventionnelles ?’
En d’autres termes, quand on retire les mots de leur contexte, on pourrait croire que la Turquie accepte inconditionnellement l’intervention des missiles des USA, du RU et de la France dirigée contre le régime de Damas’. Et pourtant non, il n’en est rien Mails ils font de ces déclarations ce qui les arrange, qu’y pouvons-nous?
L’un de leurs objectifs est de pourrir les relations entre la Turquie et la Russie.
L’un des avantages qu’ils ont obtenu des frappes contre Damas est la dégradation des liens entre la Turquie et la Russie, qui agit actuellement en coordination avec la Syrie. Macron a vendu la mèche. Ce qu’il a dit est : ‘Nous frappons Assad. La Turquie a jugé l’intervention positive. Cela signifie l’existence d’une crise entre la Russie et la Turquie’.
Il semble que c’était là l’un de leurs objectifs. Peut-être était-ce le véritable objectif…
« A ce stade, nous devons nous demander : ‘N’est-ce pas une étape importante pour faire cesser le bain de sang que la Turquie et la Russie trouvent un terrain d’entente au sujet de la Syrie ? Ou encore, n’est-ce pas juste pour la Turquie de coopérer avec la Russie en vue d’assurer sa pérennité tout en prenant des mesures dans le nord de la Syrie, qu’elle considère comme une menace ?
A partir du moment où nous répondons ‘oui’ à cette question, nous sommes accusés d’être ‘pro-russes’ ou ‘pro-Eurasie’ (…).
Et pourtant, avec quelle vitesse avons-nous oublié que les Etats-Unis ont livré au Parti affilié du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), le Parti de l’Union démocratique (PYD) et sa branche armée, les Unités de protection du Peuple (YPG), 500 camions d’armes ? Avec quelle rapidité nous avons oublié que lorsque nous sommes entrés à al-Bab, les Etats-Unis, qui voulaient stopper la Turquie au moyen des terroristes de Daech, ont retardé l’opération de Raqqa et ignoré les terroristes qui venaient d’Al-Bab. »
La suite en anglais ici
Notes :
[1] Voir MEMRI Special Dispatch No. 7429, Ibrahim Karagül, Editor-In-Chief Of AKP Mouthpiece ‘Yeni Safak’: Russia-Turkey-Iran Coalition Does Not Exist; Turkey Should Build A ‘Shield From The Mediterranean To The Iranian Border’ To Prepare For Upcoming New World Order War, 16 avril 2018.
No: 105, Press Release Regarding the Military Operation Against Certain Points in Syria by the US, the UK and France, Mfa.gov.tr, 14 April 2018.
[2] Tass.com, 14 avril 2018.
[3] Dailysabah.com, 14 avril 2018.
[4] Dailysabah.com, 16 avril 2018.
[5] Dailysabah.com, 16 avril 2018.
[6] Dailysabah.com, 16 avril 2018.
[7] Yenisafak.com, 17 avril 2018.