Au lendemain de la tentative d’assassinat du Premier ministre de l’Autorité palestinienne (AP) Rami Hamdallah et du chef des services de renseignements de l’AP Majed Faraj, le 13 mars 2018, de graves tensions ont éclaté entre le Fatah et le Hamas. Lors d’une rencontre entre les dirigeants palestiniens le 19 mars, le président palestinien Mahmoud Abbas a accusé le Hamas d’être derrière la tentative d’assassinat, d’inciter à la violence contre l’AP et d’avoir échoué à mettre en œuvre la réconciliation. Il a même menacé de prendre des mesures contre le coup d’Etat illégal du Hamas à Gaza.  

Dans la même veine, Munir Al-Jaghoub, qui dirige le Département de l’Information au sein de la Commission du recrutement et de l’organisation du Fatah, a déclaré le lendemain que le Hamas devait choisir entre la réconciliation palestinienne et le maintien de son contrôle illégal de Gaza. S’il choisit la dernière option, a-t-il déclaré, l’AP le qualifiera d’organisation rebelle et mettra fin à son financement. Soulignant qu’il était impossible d’accepter une situation dans laquelle une région se rebelle contre le pouvoir légitime (à savoir l’AP), où le groupe dominant cette zone contrôle la population au moyen d’assassinats et de terreur, tout en continuant à demander un financement à ceux contre qui il s’est rebellé, il a ajouté que la rébellion avait un prix que seuls les rebelles doivent payer.[1]

Dans ce contexte, Muwaffaq Matar, éditorialiste du quotidien de l’Autorité palestinienne (AP) Al-Hayat Al-Jadida, a lui aussi fustigé le Hamas, l’appelant à présenter des excuses pour le coup d’Etat contre l’AP, pour toutes les atrocités commises contre la population de Gaza et pour tenter de diffuser l’idéologie des Frères musulmans dans les esprits des habitants. Il a appelé les Gazaouis eux-mêmes à lancer une campagne de désobéissance civile contre le Hamas afin de rétablir le pouvoir de l’AP à Gaza. Extraits de l’éditorial de Muwaffaq Matar publié le 20 mars 2018 :

Le Hamas doit « reconnaître sa responsabilité pour la tragédie et les horreurs qu’il a infligées à deux millions de Palestiniens de Gaza »

Il n’y a pas d’autre choix que [de mener] une action populaire contre le régime illégal et la division de la bande de Gaza, et [d’imposer] des sanctions concrètes [contre ce régime]. Les habitants [de Gaza] doivent prendre position contre les dirigeants du Hamas et [s’y] conformer. Il doit y avoir une rébellion civile, qui se poursuivra jusqu’à ce que le Hamas soit contraint d’obéir à la volonté du peuple et de donner au gouvernement de consensus national le droit de remplir son rôle à Gaza, le plus tôt possible, [et jusqu’à ce que le Hamas soit contraint] d’obéir à la loi et cesse de considérer la question palestinienne comme sa marque de fabrique. En outre, le Hamas doit demander pardon à la population, et reconnaître sa responsabilité pour la tragédie et les horreurs qu’il a infligées à deux millions de Palestiniens à Gaza. De même, il doit s’engager à expier le péché de son coup d’Etat ainsi que les péchés de la violation de la liberté et de la culture nationale [palestinienne], qu’il a remplacées par les comportements et les conceptions des Frères musulmans.

Plus important encore, [le Hamas doit] reconnaître le crime de tentative d’assassinat contre l’entreprise nationale. Il doit dénoncer ceux qui ont incité [à ce crime], l’ont aidé et financé, et punir tous ceux qui ont perverti la conscience du peuple, au moyen de leurs prétendues fatwas, ont attisé les flammes de l’hostilité et de la haine entre les différents secteurs de la population, et ont autorisé l’assassinat de la conscience nationale… Ils ont incité, et continuent d’inciter au meurtre, sur fond de disputes et de positions politiques. Leur incitation à ce genre de crime était planifiée. Ils ont préparé des arguments religieux pour le justifier depuis les chaires des mosquées, et y ont vu un moyen pour les auteurs [de ces crimes] d’obtenir les clés du Paradis.

Les Etats-Unis veulent entretenir les divisions palestiniennes pour empêcher la création d’un Etat palestinien 

La tentative d’assassiner le Premier ministre palestinien Rami Hamdallah et le chef des services de la sécurité générale Majed Faraj n’est pas le premier crime commis par les membres du Hamas et ne sera pas le dernier. Ce n’est pas non plus le pire, car le pire est que le Hamas considère ce qui s’est passé [à savoir la tentative d’assassinat] comme l’acte commis par un enfant imprudent, comme cela a été exprimé dans les médias du Hamas et dans la version des événements relayée par ses dirigeants et porte-parole. Le pire des crimes se produira bientôt, lorsque les dirigeants du Hamas putschistes et encourageant la division découvriront que les Etats-Unis ont commencé à leur ouvrir les portes, à instaurer des relations avec eux et à leur accorder… de l’aide – [et tout cela] afin de maintenir la division palestinienne, situation dans laquelle il est imposssible de donner au peuple palestinien la souveraineté dans l’Etat [palestinien] que le monde reconnaît déjà dans les frontières du 4 juin 1967 : en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, [qui est] la capitale éternelle de la Palestine, et dans la bande de Gaza.

Aucun patriote palestinien ne consentira à verser une seule goutte de sang, et n’envisagera d’accroître le chiisme social ou l’hostilité que les dirigeants du Hamas, qui appartiennent aux Frères musulmans, tentent de semer dans l’âme [des Palestiniens]. Nous connaissons les dangers à long terme, et nous savons parfaitement bien à quel point les dirigeants de l’occupation se réjouiront lorsque nous aurons atteint ce niveau de chiisme [interne].

En conséquence, la désobéissance civile non violente [à Gaza contre le Hamas] est possible, et peut s’accomplir sans causer la perte d’une seule vie. Tout ce qui est nécessaire est de rallier la volonté individuelle et le collective derrière cet objectif suprême : le retour de Gaza, avec sa terre et ses habitants – y compris les membres et partisans du Hamas – dans la patrie. Ainsi, nous les libérerons de la politique de tromperie et d’incitation à la haine du [Hamas]…

Tout que l’on demande aux habitants de Gaza est de respecter la loi et la légitimité, et de rejeter les relations avec tous les éléments sécuritaires, politiques ou économiques [du Hamas]. Ils doivent se libérer de la peur, car il n’existe aucun moyen de supprimer l’injustice si le peuple n’adopte pas de position unifiée, correspondant aux décisions des dirigeants palestiniens [légitimes]. Ces dirigeants n’ignoreront pas le complot visant à faire exploser la caravane du [gouvernement légitime, à savoir l’AP] et à détruire la réconciliation et la colonne vertébrale de l’entreprise nationale. Nous punirons les auteurs, même bien plus tard.

Nous assistons à un conflit entre l’entreprise du mouvement de libération nationale palestinienne et l’entreprise des [Frères musulmans].

Lien vers le rapport en anglais

Note :

[1] Maannews.net, 21 mars 2018.

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