Le président palestinien Mahmoud Abbas a dernièrement décerné la “médaille d’honneur” à l’écrivain égyptien Mohamed Salmawy, ancien président de l’Union des écrivains égyptiens et actuellement conseiller de celle-ci, pour sa contribution littéraire à la cause palestinienne. La cérémonie d’attribution s’est tenue à l’ambassade palestinienne au Caire, en présence d’officiels et d’écrivains palestiniens. Les intervenants, au cours de la cérémonie, ont estimé que les œuvres de Salmawy relataient les histoires des martyrs et servaient “d’armes littéraires-idéologiques” au service de la cause palestinienne. Il y a un mois, Salmawy a également reçu le “Prix Afrique Yasser Arafat pour la liberté et la paix” au Sénégal, sur l’initiative de l’ambassadeur palestinien dans le pays. Ce prix a été décerné lors d’un événement festif sponsorisé par le président sénégalais, en présence de l’ambassadeur palestinien et d’officiels arabes. 

Salmawy, connu dans le monde arabe et notamment en Égypte, l’est notamment pour ses opinions antisémites. En février 1998, il publiait dans le quotidien égyptien en langue française Al-Ahram Hebdo un article intitulé “Cherchez les Juifs!”, dans lequel il soutenait, citant les négationnistes Roger Garaudy et David Irving, que les Juifs cherchaient à porter préjudice à toute personne qui ne les soutient pas. Il laissait entendre que les Juifs étaient derrière l’affaire Lewinsky et qu’ils avaient voulu empêcher le président américain Bill Clinton de faire pression sur le gouvernement israélien pour qu’il fasse des concessions aux Palestiniens. Il s’en prenait aussi à la loi française criminalisant la négation de la Shoah, et à l’inculpation de Roger Garaudy sur le fondement de cette loi, écrivant : “En effet, le penseur Roger Garaudy est jugé conformément à une loi qui semble appartenir Moyen-Âge, mais qui ne date que de 1990. Cette loi, qui porte le nom du député qui en est à l’origine, Jean-Claude Gayssot, interdit la contestation de crimes contre l’humanité. Mais le mot ‘humanité’ ne signifie pas ici le genre humain, mais seulement les six millions de Juifs qui auraient été victimes d’un génocide lors de la seconde Guerre mondiale”.(1)

L’article d’Al-Ahram Hebdo

En 2002, Salmawy a publié une anthologie intitulée “Wafa Idris et autres histoires palestiniennes”, dont le principal récit fait l’éloge de Wafa Idris, du camp de réfugiés d’Al-Amari près de Ramallah, première Palestinienne à avoir trouvé la mort dans un attentat-suicide. Idris avait perpétré un attentat dans une rue du centre de Jérusalem en janvier de la même année, au début de la Deuxième Intifada, tuant un homme et en blessant plus de 100. L’attentat n’avait initialement pas été revendiqué, mais trois jours plus tard, la branche armée du Fatah, les Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa, l’avaient revendiqué. Le récit de Salmawy a également été la trame d’un film intitulé “Bombe”. (2)

La couverture du livre Wafa Idris and Other Palestinian Stories (image : goodreads.com)

Salmawy dans une série d’articles : le lobby juif a secrètement organisé la nomination d’Audrey Azoulay à la tête de l’UNESCO

Cette année, Salmawy a publié une série d’articles au ton antisémite, concernant la désignation de l’ancienne ministre de la Culture française Audrey Azoulay, d’origine juive, à la direction générale de l’UNESCO. En juillet, quelques mois avant sa désignation, il publiait des articles contre sa candidature, affirmant qu’elle avait été mise en avant par l’ancien président François Hollande afin d’empêcher la nomination d’un candidat arabe. Il a observé qu’elle était la fille d’André Azoulay, conseiller du roi du Maroc Mohammed VI, “qui appartient à une grande famille juive ayant des relations avec les groupes de pression juifs en France, notamment le CRIF, organisation regroupant les associations juives en France”.

Salmawy a également mentionné qu’il s’était opposé à la nomination d’Azoulay en remettant à l’ambassadeur français en Égypte une pétition signée par plusieurs dizaines d’intellectuels, d’artistes et d’anciens ministres arabes, demandant au président français Macron de retirer sa candidature.

En octobre, après sa désignation, Salmawy a publié des articles affirmant que le “lobby juif” avait agi en coulisses et exercé des pressions intenses pour l’organiser, cela dans l’objectif présumé d’empêcher le choix d’un candidat arabe. Il a avancé que le CRIF avait promis à Macron, avant son élection à la présidence, de soutenir sa candidature si Macron, de son côté, soutenait celle d’Azoulay à la direction de l’UNESCO. Selon Salmawy, le CRIF aurait également demandé à Macron de promettre que la France agirait pour mettre fin au préjugé anti-Israël à l’UNESCO.

Salmawy a encore écrit que “ce n’est un secret pour personne que le lobby juif a exercé toute son influence en faveur de la candidate française [Azoulay], même s’il ne l’a pas exprimé publiquement”. Les pressions d’acteurs juifs, a-t-il affirmé, étaient aussi derrière la décision des États-Unis et d’Israël d’annoncer leur retrait de l’UNESCO, juste avant l’élection de son nouveau directeur général, dans le but d’influer sur le résultat et d’obtenir la victoire d’Azoulay. (3)

Audrey Azoulay (image : alwasat.com.kw, 10 novembre, 2017)

Salmawy reçoit la médaille d’honneur de la part du président Abbas à l’ambassade du Caire

Comme indiqué, Salmawy s’est récemment vu décerner la médaille d’honneur de la part du président palestinien, lors d’une cérémonie qui s’est tenue à l’ambassade palestinienne du Caire. L’invitation à la cérémonie indiquait : “Reflétant l’estime du président palestinien Mahmoud Abbas, puisse Allah le préserver, pour le grand écrivain et journaliste Mohamed Salmawy, l’ambassade de l’État palestinien en Égypte et l’Union des auteurs palestiniens ont l’honneur de vous inviter à la célébration en l’honneur de [Salmawy], lors de laquelle sera décernée la médaille d’excellence dans le domaine de la culture, de l’art et de la science”. (4)

La nouvelle de la remise de la médaille à Salmawy a été largement diffusée dans la presse égyptienne. Le quotidien égyptien Al-Masri Al-Yawm a rapporté : “Le président de l’Etat palestinien a décerné à l’écrivain et personnalité des médias Mohamed Salmawy la médaille d’excellence dans le domaine de la création, de la culture, de l’art et de la science. Elle est considérée comme l’une des plus hautes distinctions palestiniennes, décernée à de grands [penseurs dans les domaines de] la philosophie, de la littérature et de la culture pour promouvoir la justice et défendre les droits légitimes du peuple palestinien. [Salmawy l’a reçue] en appréciation de sa contribution aux arts et aux médias dans les pays arabes et dans le monde, et en appréciation du rôle joué au service des causes arabes, et principalement de la cause palestinienne”. Le compte-rendu dit en outre que “la médaille a été décernée [à Salmawy] de la part de Mahmoud Abbas, par l’ambassadeur palestinien au Caire Diab Al-Louh ; le ministre palestinien de la Justice Ali Abou Diak ; le secrétaire-général adjoint de la Ligue arabe aux affaires palestiniennes Saïd Abou Ali, et le secrétaire général de l’Union des écrivains palestiniens et poète Murad Al-Sudani… Ils ont observé que les récits de Salmawy reflétaient les déclarations des martyrs, la fermeté [palestinienne] et les défis auxquels sont confrontés ceux qui restent loyaux à leur terre et qui [ont versé] leur sang pour défendre leurs droits nationaux et historiques”. (5)

L’article paru le 22 novembre 2017 dans le quotidien égyptien Al-Masri Al-Yawm, intitulé “Demain, [le président de l’AP Abou Mazen décernera à Salmawy la plus haute décoration culturelle de Palestine”

L’article paru le 22 novembre 2017 dans le journal égyptien Al-Ahram, intitulé « Abou Mazen décerne à Salmawy la prestigieuse Médaille d’honneur palestinienne”

L’ambassadeur palestinien au Caire : Salmawy a fourni “des armes littéraires-idéologiques” pour défendre la cause palestinienne

L’ambassadeur palestinien au Caire Diab Al-Louh a déclaré lors de la cérémonie que “l’attribution de la médaille à un homme du calibre [de Salmawy] est une expression de la loyauté de la Palestine et du président palestinien envers l’Égypte… L’écrivain Salmawy a fourni des armes littéraires-idéologiques qui ont renforcé une idée et défendu la liberté et le combat des Palestiniens. La médaille [symbolise] le privilège de la nation arabe et son devoir [d’aider] la Palestine et d’encourage tous ceux qui défendent la justice de la cause palestinienne”. (6)

Salmawy avec le ministre de la Justice palestinien Ali Abu Diak (image : Al-Yawm Al-Sabi, Égypte, 23 novembre 2017)

Le Secrétaire général de l’Union des écrivains palestiniens : Salmawy « a toujours glorifié Wafa Idris », première femme à avoir commis un attentat-suicide en Palestine

Le quotidien égyptien Al-Yawm Al-Sabi rapporte que “le poète Murad Al-Sudani, secrétaire général de l’Union des écrivains palestiniens, qui assistait à la cérémonie, affirmé que Mohamed Salmawy avait toujours soutenu différentes causes liées à la Palestine et y avait consacré du temps et de l’énergie. Il a toujours fait l’éloge de la combattante Wafa Idris. Par conséquent, la Palestine était tenue de l’honorer”. (7)

Le quotidien Al-Masri Al-Yawm a rapporté que Mohamed Salmawy, de son côté, “avait fait l’éloge d’Abbas pour son soutien à la culture arabe, soulignant que l’octroi d’une telle médaille nationale était une vraie responsabilité, car il reflétait la conscience d’une génération entière ayant fait preuve d’une ouverture considérable dans sa perception des causes nationales, dont la plus importante était la Palestine. C’est le reflet naturel du combat [de cette génération] dans la littérature et les médias, pour faire respecter le bien-fondé de la liberté palestinienne. [Salmawy] a affirmé que ses différentes fonctions avaient requis de lui qu’il représente la Palestine sur chaque plateforme idéologique et auprès des unions internationales, afin de souligner la présence de l’État de Palestine, qui existe [déjà], même s’il n’a pas encore été nommé [officiellement] – car la réalité montre que le peuple et la patrie palestinienne existent, tout comme leur littérature, leur culture et leur histoire”. (8)

Salmawy s’exprimant lors de la cérémonie ; en arrière-plan, l’invitation de l’ambassade de Palestine (image: Al-Yawm Al-Sabi, Égypte, 23 novembre 2017)

Salmawy reçoit le “Prix Yasser Arafat” à l’initiative de l’ambassadeur palestinien au Sénégal

En sus de la médaille qui lui a été décernée par Abbas, Salmawy a récemment reçu le “Prix Yasser Arafat d’Afrique pour la Liberté et la Paix” au Sénégal, sur l’initiative de l’ambassadeur palestinien dans ce pays. La cérémonie, qui s’est tenue à Dakar en présence d’officiels sénégalais et des ambassadeurs d’Égypte, de Palestine et du Koweït, ainsi que d’écrivains et de représentants des médias, était sponsorisée par le président du Sénégal Macky Sall. (9) Le président de la commission d’attribution du prix a expliqué que Salmawy était honoré en raison de “sa contribution littéraire éminente et significative, qui inclut des positions honnêtes de défense des causes et droits des peuples combattant pour leur liberté et leur indépendance, et en particulier en raison du vif intérêt porté à la défense du bien-fondé de la cause palestinienne – et en raison de son implication dans le combat du dirigeant Yasser Arafat. » (10)

Salmawy recevant le prix à Dakar (image : Akhbar Al-Yawm, Égypte, 18 novembre 2017)

 En septembre cette année, Salmawy a également reçu le Prix Al-Quds, plus haute distinction décernée par l’Union des écrivains arabes. (11)

Notes .

[1] Al-Ahram Hebdo (Egypte), 4 février 1998.

[2] Al-Sharq Al-Awsat (Londres), 22 avril 2002.

[3] Al-Ahram (Egypte), 2 juillet 2017 ; 9 juillet 2017 ; 15 octobre 2017 ; 22 octobre 2017 ; 29 octobre 2017.

[4] Al-Yawm Al-Sabi (Egypte), 23 novembre 2017.

[5] Al-Masri Al-Yawm (Egypte), 23 novembre 2017.

[6] Al-Masri Al-Yawm (Egypte), 23 novembre 2017.

[7] Al-Yawm Al-Sabi (Egypte), 23 novembre 2017.

[8] Al-Masri Al-Yawm (Egypte), 23 novembre 2017.

[9] Akhbar Al-Yawm (Egypte), November 18, 2017.

[10] L’ambassadeur palestinien au Sénégal, Dr. Safwat Bregheith, a déclaré lors de la cérémonie que les dirigeants palestiniens cherchaient à resserrer les relations historiques entre l’Afrique et la Palestine, suivant les traces de l’éternel leader Arafat dans sa quête de liberté et de paix, de la création d’un État palestinien dans les frontières de 1967 ayant Jérusalem pour capitale, et avec le retour des réfugiés jusqu’aux habitations d’où ils ont été expulsés. Al-Watan (Egypte), 10 octobre 2017.

[11] Al-Yawm Al-Sabi (Egypte), 21 septembre 2017.

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