Par O. Peri *

Ces dernières semaines, alors que la huitième année de la guerre en Syrie touche à sa fin et que le régime d’Assad contrôle la majeure partie du territoire syrien, les médias liés à l’opposition syrienne rapportent que l’opposition populaire et armée contre le régime et ses alliés ont repris dans le sud du pays, et notamment dans le gouvernorat de Deraa, où les protestations avaient débuté en 2011. Les forces rebelles de Deraa ont été contraintes de capituler face au régime en juillet 2018 et de signer des « accords de réconciliation » avec lui, dans le cadre desquels elles ont rendu leurs armes, lorsque les Etats-Unis les ont informées qu’ils ne les protègeraient plus contre les attaques de l’armée du régime et des forces russes.[1] Des informations indiquent que les habitants du gouvernorat sont furieux contre le régime qui, selon eux, continue d’arrêter des locaux et d’envoyer d’anciens rebelles, qui avaient été enrôlés dans l’armée, combattre au nord du pays, en violation des accords de réconciliation.[2]

La recrudescence de l’opposition populaire au régime dans le gouvernorat de Deraa s’est traduite par la dégradation de portraits d’Assad et par l’esquisse de graffitis anti-régime. Dans la ville de Dael, au nord de Deraa, des graffitis « A bas Assad » sont apparus, et un portrait de lui face à la mairie a été lacéré.[3] On pouvait lire sur un graffiti dans la ville de Ghabaghb : « Nous ne capitulerons pas. Attendez-vous à une nouvelle révolution. Nous n’oublierons pas nos martyrs. La révolution est une idée et les idées ne meurent jamais. » [4] Dans la ville d’Al-Sanamayn, le drapeau du régime a été arraché.[5]

Toutefois, au-delà des protestations populaires, des opérations armées ont aussi eu lieu, telles que des assassinats, des tirs et des explosions contre des cibles liées au régime et aux milices qui le soutiennent, y compris le Hezbollah. Si la plupart des attaques n’ont pas été revendiquées, certaines informations les ont attribuées à un nouveau groupe, la Résistance populaire, dont les membres restent anonymes et dont l’objectif, selon certains sites d’opposition, serait « de venger les martyrs et de s’opposer au régime d’Assad jusqu’à sa chute ».[6] Une autre organisation armée apparue récemment et active contre le régime et ses alliés est celle des Brigades du Sud.

Les protestations de Deraa ont été exacerbées par la réinstallation d’une statue de Hafez Al-Assad sur la place Tishrin de la ville, après que les habitants l’ont retirée en 2011.

Le gouvernorat de Suwayda, au sud-est de la Syrie, peuplé principalement de druzes, a également connu des protestations récentes contre le régime, après les tentatives de recruter des habitants pour combattre en dehors du gouvernorat. Les manifestants accusent aussi le régime de tenter de « chiitiser » la région et de semer la division parmi les druzes.[7]

La reprise des protestations dans le sud ont suscité des réactions dans d’autres parties du pays. Dans la ville d’Al-Bab, contrôlée par les rebelles dans le gouvernorat d’Alep, une manifestation s’est tenue en solidarité avec Deraa, au cours de laquelle les manifestants ont scandé « Deraa, Alep est à tes côtés jusqu’à la mort ».[8]

Le régime, de son côté, a envoyé des représentants dans le gouvernorat de Deraa, pour tenter de calmer les protestations. Le 24 février 2019, le chef du bureau des renseignements généraux à Deraa, Muhammad Muhallah, a rencontré des habitants de la ville de Tafas et a promis d’agir en vue de libérer les habitants détenus par le régime.[9] Le 9 mars 2019, de hauts-responsables du parti Baath au pouvoir ont rencontré des habitants de Daraa pour discuter du retour des habitants qui avaient fui leurs foyers.[10] Toutefois, selon des sites d’opposition, ces rencontres ont été marquées par une controverse entre les parties, et il semblerait que les tentatives du régime pour réprimer les protestations n’aient pas été couronnées fructueuses.[11]

Dans le même temps, les médias gouvernementaux ont publié de nombreuses informations rapportant que les habitants de Deraa se réjouissent du retour du régime et du calme qui règne dans la région.

Graffiti dans la ville d’Al-Hirak au sud de la Syrie « A bas Assad, va-t’en, criminel »

* O. Peri est chargé de recherché à MEMRI.

Lire la suite du rapport en anglais

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