Par : Z. Harel *

Le 1er août 2017, suite à un débat animé et dans le cadre d’une série d’amendements juridiques, le parlement jordanien a abrogé l’article 308 du Code pénal permettant aux violeurs d’éviter toute sanction s’ils épousent leurs victimes. La Jordanie rejoint ainsi plusieurs autres pays arabes ayant révoqué des lois similaires, parmi lesquels le Maroc, la Tunisie et l’Égypte. [1]

L’abrogation de cette loi en Jordanie représente un important succès pour les organisations de défense des droits de l’homme et de la femme dans le pays ; ces organisations ont fait, au cours des dernières années, campagne pour modifier les lois nuisant au statut des femmes, dont l’article 308. Dans le cadre de ces initiatives, une coalition de 52 organisations sociales a été créée en 2015, avec le soutien de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID). [2] La coalition a oeuvré pour sensibiliser l’opinion à la nécessité d’abolir l’article 308 en organisant, entre autres, des manifestations et rassemblements. La coalition a considéré que la loi encourageait le viol, notamment des mineures, et enfreignait les droits des femmes.

L’establishment jordanien s’est montré réceptif à la campagne pour l’abrogation de la loi. Une commission royale créée en 2017 par le roi Abdallah II pour développer le système juridique et consolider l’Etat de droit a recommandé l’abolition de l’article 308, parmi d’autres amendements [3]. Le gouvernement jordanien a approuvé la recommandation de la commission et transférée à la branche législative. [4]

Cependant, malgré le soutien de l’establishment, l’appel à révoquer l’article s’est heurté à l’opposition des milieux conservateurs [5], pour lesquels le mariage demeure la solution aux cas de viol, en ce qu’il préserverait l’honneur de la femme. Ces cercles ont eu le dessus au sein de la commission juridique de la Chambre des représentants (la chambre basse du parlement) et ont recommandé, contrairement au comité royal, de ne pas abroger l’article 308, mais seulement de l’amender. [6] Toutefois, comme indiqué plus haut, malgré les recommandations de la commission juridique et suite à un débat animé, la position du gouvernement a été adoptée et l’article aboli. [7]

Les réactions en Jordanie à la révocation de l’article 308 ont été majoritairement favorables. Des officiels et des articles de presse ont salué l’initiative, la qualifiant de succès parlementaire et de moment historique. En revanche, certains conservateurs l’ont déplorée, répétant que, dans une société conservatrice, la victime d’un viol avait tout intérêt à épouser son violeur pour préserver son honneur.

Lire le rapport dans son intégralité en anglais

* Z. Harel est chargé de recherche à MEMRI

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