Dans son éditorial du 21 avril 2018, publié dans le quotidien libanais Al-Nahar intitulé « Le Hezbollah se réinstalle en Syrie », Ahmad Ayyash a abordé la politique de transfert et de changement démographique forcé que le régime de Bachar Al-Assad mène dans le pays ces dernières années, avec le concours du Hezbollah et de ses autres alliés[1]. Selon Ayyash, il s’agit en fait d’un « plan de colonisation » iranien, qui comprend l’expulsion des résidents de différentes parties du pays et le peuplement de ces zones par des membres chiites du Hezbollah et d’autres milices soutenues par l’Iran, qui empêchent les résidents d’origine de retourner dans leurs foyers. Il avertit de l’éventualité que la présence de ces nouveaux colons en Syrie soit définitive . Extraits :

L’implication du Hezbollah dans la guerre syrienne ne se limite pas à l’action militaire, visant à soutenir le régime syrien. [Ses objectifs] vont bien au-delà, et concernent un projet de colonisation iranien dont la mise en œuvre a commencé il y a plusieurs années. L’objectif [de ce projet] est de modifier la démographie [de la Syrie] en la peuplant [de membres] des milices [chiites] soutenues par l’Iran venant d’Afghanistan, du Liban et d’autres pays de la région.

Naturellement, le monde est actuellement occupé par les implications de la question des [armes] chimiques, qui a surgi suite à l’utilisation de telles armes par le régime d’Assad… à Douma, près de Damas. Mais tout en abordant la question des armes chimiques, [le monde] ignore le plan actuel de nettoyage démographique, dans le cadre duquel des dizaines de milliers de Syriens ont été transférés de leurs maisons de la Ghouta vers le nord de la Syrie il y a plusieurs jours, et des milliers d’autres ont quitté la partie orientale d’Al-Qalamun, près de Damas, [dans le cadre d’une décision] « négociée par la Russie »…

Ces dizaines de milliers de Syriens ont quitté leurs maisons ancestrales, où leurs familles vivaient depuis des générations, tout comme des centaines de milliers [d’autres] Syriens avaient précédemment quitté leurs maisons à Alep, Hama, Homs et Al-Qosseir. Le monde a oublié [le fait] que l’Iran agit vigoureusement pour combler le vide démographique [laissé par ces Syriens], le Hezbollah oeuvrant comme le chef de la branche exécutive de ce [projet]. Tous ceux qui doutent de l’existence de ce projet iranien peuvent lire les déclarations faites par Ali Akbar Velayati, conseiller du Guide suprême [Khamenei], citées par l’agence de presse iranienne Mehr. [Il a déclaré] : « Le réveil islamique sur notre front de résistance commence à Téhéran et s’étend jusqu’à Bagdad, Damas, Beyrouth et la Palestine, et il inclura bientôt également le Yémen. Sans le soutien de l’Iran, Bagdad et Damas auraient été occupées aujourd’hui par l’Etat islamique, et Beyrouth aurait été occupée par Israël. »

Il y a plusieurs semaines, Al-Nahar a reçu des informations selon lesquelles les habitants d’Al-Qosseir auraient demandé régime syrien l’autorisation de retrouver leurs biens dans cette ville, et l’auraient obtenue. Mais lorsqu’ils ont atteint la ville, ils se sont retrouvés face à des miliciens du Hezbollah, qui continuent d’occuper militairement la ville et qui leur ont ordonné de rebrousser chemin, en leur disant : « Ceux qui vous ont autorisés [à revenir] sont invités à vous restituer vos biens. » Selon les informations que nous avons reçues, le Hezbollah investit dans le développement de milliers d’hectares dans cette région, réputée pour ses champs fertiles, et en récoltera directement les bénéfices.

L’un des aspects les plus dérangeants de ce projet iranien en Syrie a été révélé par notre collègue, [la journaliste libanaise] Randa Taqi Al-Din, dans le quotidien Al-Hayat. Elle a cité des sources françaises, qui estiment que le Hezbollah passera de « Hezbollah libanais » à « Hezbollah syrien », car ses membres s’installent actuellement en Syrie aux côtés des Iraniens.[2]

Le 6 mai, des milliers de ces colons du [Hezbollah] seront transportés en autobus vers les urnes au Liban, et en particulier dans la région de Baalbek-Hermel, [pour participer aux élections au parlement libanais]. Ils retrouveront ensuite leurs « biens », pour continuer de mener leur « devoir de djihad ».

Lien vers le rapport en anglais

Notes :

[1] Voir MEMRI en français, Avec ses alliés, le régime syrien impose un changement démographique dans plusieurs régions du pays pour se protéger et se maintenir au pouvoir, 17 novembre 2016.

[2] Selon l’article de Randa Taqi Al-Din : « Certains cercles estiment que Le Hezbollah se scindera en Hezbollah-Liban et Hezbollah-Syrie, car les membres du Hezbollah s’installent en Syrie aux côtés des Iraniens. Les familles des combattants du Hezbollah qui ont été tués ont été indemnisées avec des maisons à Homs et dans d’autres régions. » Al-Hayat (Dubaï), 20 avril 2018.

 

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